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Les yeux de la lune

La Toussaint marquait le début de la mauvaise saison, je haïssais cette fête. Il fallait être triste à pleurer, faire le tour des tombes, faire semblant de prier pour des ancêtres que je n’avais jamais connus avant de stationner longuement devant la dalle de marbre recouvrant le cercueil de mon père. 

Alors que je montais vers l’église, quelqu’un me tapait sur l’épaule.

- Pierrot...

- Oui mon vieux, c’est  bien moi.

- Tu es blessé ?

Mon copain avait un bras en écharpe.

- Oui, c’est pour ça que je suis là, sinon je serais encore dans les Vosges avec les camarades, une balle perdue...sauf pour moi...

 - Michel ?

- Michel...le pauvre...il n’est pas mort, une jambe en moins, il a sauté sur une mine...si il est mort, enfin tu comprends, dis à ta mère qu’il est mort, il ne reviendra plus jamais à Brécourt avec sa jambe de bois...je vais avec toi à la messe, ma mère doit déjà être en train de prier pour le retour de son type, maintenant c’est moi qui vais  botter les fesses à ce minable.

Noël aurait du être une grande fête, nous étions libérés mais de mauvaises nouvelles nous parvenaient du front, les allemands contre attaquaient en Belgique, le bruit du canon s’amplifiait d’heure en heure, des colonnes de chars américains montaient vers les Ardennes. Ajouté à cela, un temps froid et brumeux, une neige épaisse qui pour une fois n’amusait personne, pas même les gamins. La crainte de voir revenir les boches devenait le seul sujet de conversation. Edouard avait constamment l’oreille collée au poste de radio, ce qui se passait du côté de Bastogne le touchait particulièrement.

- La neutralité adoptée au début de la guerre, quelle connerie, mes...anciens concitoyens l’ont payée cher...deux fois.



07/09/2013
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