Les yeux de la lune
- Tu ne manges pas ?
J’étais anxieux, finalement l’invitation de Marinette était un cadeau empoisonné, une telle fille doit avoir des maladies. Je voulais demander conseil à Edouard mais il était parti chez ses parents avec Simone et Pierre-Louis.
- Maurice avait à faire du côté de la ferme des Develde, il les a emmenés dans sa camionnette...pourquoi tu as un problème.
Je n’allais surtout pas parler de Marinette à grand-père.
Le désir était plus fort que la crainte, quatre heures sonnaient quand je grattais aux volets de Marinette.
- Tu es à l’heure...
J’avais oublié les risques encourus, la serveuse était une experte et je venais de vivre un moment exceptionnel
- Tu reviens quand tu veux, même le lundi, le jour de fermeture.
- Mais tu dois recevoir d’autres hommes ?
- Il n’y a plus que des vieux ici, j’en ai marre... à part les allemands...j’ai juré de ne jamais céder, et pourtant il y a quelques beaux gars parmi eux... mes parents ont été tués au début de la guerre, dans un bombardement...tu comprends.
Alors que je me rhabillais, Marinette restait nue, assise sur son lit, tortillant nerveusement un coin du drap.
- Paraît que ton copain Pierrot est dans la résistance ?
- Possible.
- Tu le vois de temps en temps ?
- Non, il n’est plus dans le secteur.
Les questions de la serveuse m’intriguaient.
- Autrement, Edouard ou ton grand-père, ils n’ont pas de contacts avec les maquisards...si je le sais figure-toi, n’aie crainte, je voudrais leur faire passer un message, j’ai pensé à toi, je sais que t’es un gars sérieux, dans le groupe qui se cache dans la forêt de Lesse, il y a un certain Cornot, C.O.R.N.O.T
Marinette m’épelait ce nom inconnu.
- C’est un salopard, un pourri qui vendrait son âme au diable.
- Il est déjà venu dans ta chambre.
- Oui, une fois et il m’a tout dit, il est en cheville avec un homme d’ici...tu le connais...le receveur des postes.
- Quoi, le receveur est un collabo ?
- Ouais, mais tu ne parles pas de moi surtout, tu fais prévenir les résistants, avant qu’il y ait des coups durs.
- Et c’est pour parler de ça que...
- Non, j’aurais pu le dire au café, mais c’est mieux comme ça, au moins tu me crois...tu sais que je dis la vérité, c’est comme si j’allais dire maintenant au prochain client que tu as couché avec Thérèse et Jacqueline, il me croirait aussi...n’aie crainte, je n’irais pas le répéter.
Quel imbécile je suis, je venais de lui avouer qu’avec Thérèse et Jacqueline...
- Tu es certain de tes sources ?
Sans donner le nom de mon informatrice à Edouard, je lui avais juré que c’était la vérité.
- Affaire réglée, enfin en partie seulement, le traitre a été confondu et... pour le receveur, ce sera plus délicat.
- Et quoi, Cornot, ils l’ont supprimé ?
- Un accident, en manipulant une arme, le type s’est flingué...c’est toi qui as donné l’information, je te signale.
Jamais je n’avais passé une nuit aussi difficile, ce n’est que sur le matin que je parvenais à dormir un peu mais, dès le réveil, mes angoisses revenaient en force. J’étais responsable de la mort d’un homme...et si Marinette s’était trompée ? Edouard m’avait dit que Cornot avait été confondu, et le receveur ? les maquisards vont venir lui faire la peau...c’est certainement lui l’auteur des lettres anonymes, j’aimerais en être certain, sa disparition me toucherait moins.
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