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Les yeux de la lune

Grand-père était surpris quand je lui avais demandé de me prêter ses gros ciseaux à haie.

- Que veux-tu couper, j’ai taillé les thuyas la semaine dernière.

Il fallait bien que je lui avoue la vérité.

- Toi, travailler chez les autres, c’est la meilleure, alors que chez toi...enfin, tu as sûrement de bonnes raisons.

J’estimais qu’effectivement j’avais de bonnes raisons de rendre service aux dames Richard, j’espérais une récompense.

 

Je m’étais appliqué et sans fausse modestie, j’avoue que j’étais fier de mon travail, l’entrée était bien dégagée mais juste assez pour préserver une certaine intimité. Mon deuxième élan vers Mathilde était couronné de succès.

- Je suis folle...reviens ce soir, dix heures, passe par la véranda, elle sera ouverte, je ne voudrais pas que Nanou...

Je tournais en rond comme un lion en cage, maman avait remarqué mon manège, je sentais des interrogations dans son regard mais elle n’osait poser des questions.

 

- Je sors, je ne reviendrais que...au petit matin.

- Réponds-moi Christophe, tu n’as pas été embrigadé dans une équipe de maquisards ?

Ma réponse négative tranquillisait maman, elle se doutait que ma sortie nocturne avait un motif plus futile que celui de lutter contre l’occupant et j’éprouvais une sorte de honte.

 

La nuit avait été divine, Mathilde m’avait fait découvrir un autre visage de l’amour charnel, la naïveté de Jacqueline, la fausse pudeur de Thérèse et le professionnalisme de Marinette étaient oubliés. Jusqu'à mon départ, la dame avait gardé la même attitude, un mélange de tendresse et de sensualité.

- Allez file avant que le jour se lève.

Je n’osais lui demander un autre rendez-vous.

Je m’arrêtais, des bruits de pas montaient vers la ruelle et il me semblait entendre des voix.

Je sautais au-dessus d’une clôture de jardin et me dissimulais derrière un bosquet de sureaux.

Deux ombres me passaient sous le nez, je ne pouvais les identifier mais chacune portait un fusil à l’épaule.

J’attendais que les inconnus parviennent en haut de la ruelle pour sortir du jardin.

Je mettais la clé dans la serrure quand des coups de feu éclataient, difficile de localiser leur provenance dans la nuit.

Maman ouvrait brusquement la porte de sa chambre.

- Tu es là ! la fusillade, ce n’était pas pour toi, j’ai eu peur?

Je rassurais ma mère et appréhendais ses questions mais elle retournait se coucher, me souhaitant bonne nuit d’un ton un peu moqueur.



06/07/2013
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