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Les yeux de la lune

Le logement de mademoiselle Lonny était encombré d’un nombre incroyable de bibelots, une odeur indéfinissable flottait dans le salon.

- Je ramasse tout ce que je trouve, c’est une manie.

Je prenais un certain plaisir à travailler le français, un peu moins les mathématiques, la géographie continuait à me passionner, je découvrais la philosophie et particulièrement Spinoza.

- Cela me fait plaisir que tu apprécies les écrits de ce grand philosophe.

 

J’étais venu rodailler autour de la maison de Thérèse, espérant qu’elle soit dans son jardinet, puis,  un jour de pluie j’avais eu le courage de sonner à sa porte.

- Ah ! tout de même, je te voyais passer devant ma fenêtre en faisant semblant de tourner la tête, que veux-tu boire ?

J’acceptais du cidre bouché, un peu pétillant et acide.

- Les dernières bouteilles de François, il faut les boire sinon le cidre va se piquer…je me demande s’il en boit en Allemagne, et que doit-il manger, lui qui a un estomac délicat.

 

Impossible de décrire ce que je venais de vivre, j’avais eu l’impression d’être dans un état second, comme si je n’étais pas moi.

- Alors ?

Edouard avait compris.

- Maintenant tu pourras t’attaquer aux filles de ton âge, c’est aussi de cette façon que j’ai fait mes premiers...pas.

 

Thérèse dictait sa loi, n’acceptant de me recevoir que le jour où elle l’avait décidé et cette autorité me pesait. Tout en pensant toujours à Lily, je ne voyais que Jacqueline capable d’assouvir concrètement mes nouvelles envies et, à ma grande surprise, ma première tentative était couronnée de succès.

- Demain, sur les coups de dix heures, je vais à la chènevière arracher quelques carottes, tu me rejoins en passant par le talus.

Les cabanons de jardin  situés contre le remblai de la ligne de chemin de fer étaient habitués à recevoir des couples clandestins, il était facile de s’y introduire en longeant la butte et en se dissimulant derrière la haie épaisse. Quand j’avais onze douze ans, avec quelques copains, nous venions nous poster dans les fourrés et nous assistions à des rencontres surprenantes.

- Ben dis-donc, on voit que la belle Thérèse te donne des leçons.

J’évitais de relever cette phrase, seul le résultat comptait, et il est vrai que dans cet endroit secret, avec une fille de mon âge...à nouveau l’image de Lily revenait dans mon esprit.



19/03/2013
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