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Les yeux de la lune

Je brûlais de lire la lettre que maman me tendait.

- Elle vient de Paris, tu connais quelqu’un dans la capitale ?

- Peut-être.

- Mais tu n’es pas pressé de l’ouvrir ?

J’avais toujours partagé mes joies et mes peines avec maman,  seulement cette fois, je voulais m’isoler..

Malgré le regard attristé de maman, je filais dans la remise.

Lily m’annonçait qu’elle ne viendrait pas à Brécourt durant les vacances, elle écrivait qu’elle tenait à rester avec sa mère, malgré les doux baisers qu’elle m’envoyait, j’avais envie de pleurer.

- A ton âge ce n’est pas grave, et puis elle viendra à Noël.

J’avais tout avoué à maman, j’avais tellement besoin de réconfort.

- Et si j’allais à Ligneulles ?

- Mais nous avions écrit que cette année tu restais ici...un mois alors, pas plus.

 

Mademoiselle Lonny avait raison concernant le certif, l’écrit s’était bien passé mais tout de même, j’avais éprouvé quelques difficultés à résoudre un problème d’arithmétique pourtant assez facile. Le pire fut l’oral où d’un seul coup je perdais mes moyens, bégayant comme jamais, il faut dire qu’en face de moi, entre un inspecteur à la barbichette noire et un instituteur au crâne lisse, se tenait une jolie une femme aux cheveux de feu, aux yeux de braise, aux lèvres purpurines.

Ma réussite mitigée avait déçu mademoiselle Lonny, elle comptait sur moi pour avoir un élève premier du canton.

- Il faudra que tu révises certaines matières avant la rentrée au collège.

Justement, mon avenir scolaire était compromis, maman avait exprimé son désir de me garder près d’elle tant que cette guerre durait. J’avoue que sans le montrer réellement, c’était également mon souhait, être enfermé dans un pensionnat, loin des mes collines et de ma rivière  me faisait peur.

J’aurais presque embrassé mon institutrice, elle s’était proposée pour me prodiguer, dès la rentrée, des cours équivalents à ceux que j’aurais reçus au collège.

Grand-père avait fait la grimace puis il avait accepté, maman ayant trouvé un argument de poids.

- Vous savez que la pension est proche de la gare, si les Anglais viennent la bombarder.

 



05/03/2013
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