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Les reposoirs

La fête de l’Assomption avait un caractère particulier dans les paroisses rurales, elle était célébrée avec faste dans mon village. Avant la messe, la statue de la Vierge était promenée dans les rues du village, portée par quatre hommes solides et d’égales statures. Devant elle, le curé, vêtu de ses plus bels ornements, était entouré des enfants de chœur. Autour de la statue, des fillettes portaient des paniers décorés et emplis de pétales de rose qu’elles jetaient régulièrement à pleine poignée. Derrière, la file des paroissiens menée par la chorale, s’allongeait. Sur le passage de la procession, les chaussées étaient tapissées de fleurs multicolores, avec, aux carrefours, des rosaces du plus bel effet. Chaque quartier avait confectionné un reposoir devant lequel s’arrêtait le cortège pour chanter des cantiques et réciter des prières. La statue de Notre-Dame était déposée sur un autel provisoire. Les reposoirs représentaient le reflet du quartier, les habitants rivalisaient d’adresse, cherchant des angles originaux pour étonner les fidèles, le curé ne manquait pas de féliciter les créateurs. Le reposoir situé en haut de la rue Mazelle, élaboré sous la direction de ma grande tante Maria était toujours le plus beau. Couturière de profession, elle utilisait des toiles de mousseline, des velours et autres textiles nobles du plus bel effet. Une année pourtant, l’attention s’est surtout portée sur le reposoir du quartier de la Gare. Dans une reconstitution de la grotte de Lourdes, les personnages étaient réels, Bernadette n’était autre que Lucette, la fille du boucher et les petits bergers, des enfants du quartier. L’idée de placer de vrais moutons avait été abandonnée, ils commençaient à manger le décor. Seulement, les cantiques et le rosaire duraient, duraient, et Roger, le plus petit des bergers avait une envie pressante qu’il ne pouvait maîtriser. <Miracle ! S’écriait le curé qui avait beaucoup d’humour, une source a jailli à Massabielle!>.