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Les Planchettes à la une

- Vous avez l'air de prendre cette affaire à la rigolade, vous êtes marrant, ce bois nous coûte de l'argent... le façonnage, le transport jusqu'ici, au moins six stères envolés, et si on laisse faire, la pile disparaît.

En parlant de pile, l'homme est modeste, sur une longueur que j'évalue à au moins cinquante mètres, sur une hauteur d'environ quatre mètres, des rondins et des bûches d'un mètre s'entassent sur deux rangées, vers le bout, le bois est  manifestement stocké depuis longtemps, il présente des signes évidents de vieillesse.

- C'est donc ici que Robert Morel a été enseveli ?

- Ne me dites pas que vous vous intéressez à la mort de ce clochard, votre journal a autre chose à relater que de parler des poivrots.

La réaction du forestier est vive, il ne pense qu'à ses quelques rondins envolés.

- Plus loin, presque au bout, cet imbécile a tout simplement voulu piquer une bûche comme cela lui arrivait de temps en temps, il a tiré au beau milieu, vous pensez, ça c'est écroulé comme un château de cartes...

- Vous vendez ce bois de chauffage, vous trouvez encore des acheteurs?

Je change de conversation, le forestier paraît tellement convaincu de l'accident.

- Surtout pour la pâte à papier, seulement c'est tout du chêne, les usines nous le prennent à condition de leur fournir en même temps quatre vingt pour cent d'autres essences, alors voyez,  ça part au compte-gouttes.

- Comment avez-vous vu qu'il manquait du bois, sur un tel volume?

- La peinture monsieur, nous traçons un trait sur la pile, regardez, la ligne est interrompue sur une vingtaine de mètres, ils ont écrémé le dessus, le meilleur, le plus sec.

Sur une voie de garage je remarque plusieurs wagons chargés de grumes assez longues mais d'un diamètre modeste.

- Vous ne devineriez pas où sont expédiés ces billes? c'est également du chêne, elles vont servir de pilotis pour Venise, un gros marché pour sauver cette ville de la noyade, nous venons de charger notre douzième wagon.

- Finalement, vous portez plainte monsieur Bassuet?

-J'en parle au frangin et je vous le fait savoir, à mon avis ce sont les pouilleux des Planchettes qui ont fait le coup, vous êtes trop bon avec eux, ils profitent de votre bienveillance, allez faire un tour derrière leurs bicoques, vous verrez des traits  verts sur les bois.

- Il fallait un camion, à la limite une camionnette pour enlever un tel cubage, je vois  mal Igor, Maurice ou Alfred au volant d'un véhicule.

Quelques grognements de Raymond et il se dirige vers son véhicule.

- Je vous le fait savoir avant ce soir pour la plainte, je vais retrouver Lucien dans une coupe, il est en rade avec le grumier.

- Ce monsieur n'apprécie guère les résidents des Planchettes.

- C'est le moins que l'on puisse dire, et encore, d'autres sont pire que lui, nous n'avons que peu d'étrangers ici, mais d'une certaine manière, le racisme existe quand même...si vous voulez commencer à recueillir quelques informations, en descendant, nous avons vu le vélo d'Alfred devant le café de la Gare, à cette heure-ci il est encore crédible; c'est un ancien légionnaire, un peu "grande gueule" mais  bon citoyen... Je vous laisse, si vous voulez me voir je suis au bureau jusqu'à quinze heures, vous déjeunez dans nos murs j'imagine.

- Fort possible.

- Je vous conseille le café-restaurant du Puits, bonne cuisine et prix modéré...vous ne pouvez  rater Alfred, au café de la Gare, au bout du comptoir... et puis c'est certainement le seul client à cette heure-ci...



07/04/2012
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