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Les Planchettes à la une

Quelle drôle d'idée j'avais eu de quitter l'autoroute à la bretelle de Lignelles et d'emprunter la nationale, un peu marre du ronronnement régulier de mon moteur, et puis j'avais envie de voir autre chose qu'un défilement monotone de champs et de bois. Il est vrai que cette partie autoroutière est particulièrement tristounette, on a l'impression de traverser une région désertique, les bourgs et les villages se cachent aux creux des vallons, il faut un temps clair pour apercevoir la pointe d'un clocher et quelques toits, quant aux  fermes isolées elles s'abritent pudiquement derrière des bosquets. Une circulation pratiquement nulle accentuait cette impression de vide.

 C'est en sortant du bourg de Montclair qu'un attroupement avait attiré mon attention; en contrebas, le long de la voie ferrée, la présence de plusieurs véhicules de la gendarmerie  et de sapeurs-pompiers ainsi qu'une ambulance  témoignaient qu'un événement grave venait de se produire, je me dirigeais vers les lieux et j'étais vite édifié.

- Vous collez vraiment à l'actualité monsieur Passy, nous allions prévenir le correspondant local, ce n'est plus nécessaire ?

- Si vous avez ses coordonnées demandez-lui de venir tout de suite, au contraire.

Je venais de me présenter à un sous-officier de la gendarmerie.

- Adjudant Monneret, je commande  la brigade de Montclair... une voiturette sans permis, happé par l'autorail, le conducteur est mort et bien mort, voyez le travail, cela s'est produit il a vingt minutes à peine.

Les débris qui jonchent la voie ferrée sur plusieurs mètres suffisent à comprendre, le choc a dû être terrible.

- L'autorail a juste une égratignure, il a reculé en gare de Montclair, pour un contrôle, normalement, il devrait reprendre son voyage dans les prochaines minutes, je viens d'être averti.

- Vous avez identifié la victime ?

- Oui, son véhicule est bien connu ici, c'est un habitué de ce passage à niveau pourtant, il pensait avoir le temps de traverser, il a probablement calé au milieu des rails, comme il a une patte folle... pardon, une jambe atrophiée, le pauvre n'a pas eu le temps de sortir de sa cage.

- Un passage à niveau non gardé et sans barrières!

- Le feu est assez voyant et ce chemin mène dans les bois, très peu de circulation et puis pour six trains et autorails quotidiens.

A travers un rideau de peupliers, je distingue quelques habitations de l'autre côté du passage à niveau.

- Du monde tout de même.

- Ah! Les bicoques des Planchettes, aucun automobiliste dans ce quartier, tout juste quelques cyclistes et puis les résidents connaissent parfaitement les horaires des trains.

- Le chemin continue vers la forêt, des promeneurs, des forestiers doivent passer ici?

- Une autre route dessert le site, bien meilleure que ce chemin caillouteux, elle enjambe la ligne de chemin de fer par un pont, la victime, avec sa caisse à savon préfère éviter le détour, enfin préférait.

Un pompier approche.

- Plus rien sur la voie, elle est libre, nous avons dégagé les morceaux, tous les morceaux, laminés,  en bouillie, la bagnole et le pauvre Casimir, les gars de la SNCF ne sont toujours pas arrivés?

- Comme tu vois Nicolas, ils sont moins rapides que les journalistes, monsieur  travaille à La Gazette Républicaine.

Je me fais expliquer les circonstances de l'accident, le pompier semble éprouver une certaine excitation en reconstituant la scène dramatique et le résultat, sans oublier des détails horribles,  détails que je me garderai bien de publier dans notre quotidien.

Quelques badauds sont agglutinés non loin de l'ambulance et, au-delà du passage à niveau, un petit groupe de personnes regarde les opérations; c'est vers ces gens que je me dirige.

A mon approche, deux femmes et un homme se replient et remontent rapidement le chemin, une seule femme reste sur sa position, appuyée contre la rambarde, je m'approche d'elle.

- Vous avez vu l'accident?

- Vu non mais entendu oui, quel raffut, je me demandais bien ce qui arrivait, je croyais que la micheline déraillait, c'est le pauvre Casimir, ben dites-donc le v'la encore plus handicapé qu'avant...

………



28/03/2012
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