Le grand verger (suite)
- Je peux savoir où tu vas aujourd’hui, et pourquoi tu as pris une véritable douche d’eau de toilette.
Maman a raison, j’ai forcé la dose, je m’empeste moi-même.
Je bafouille une vague réponse et m’esquive.
Avant de quitter le château, je vais discrètement aux nouvelles auprès d’Alice.
- J’ai téléphoné à l’hôpital, ton protégé se remet de ses émotions fortes, tu pourras rassurer Maria, elle va bientôt retrouver son bonhomme.
Comme prévu, Nénette m’attend à la sortie du pont, à cette heure personne ne se promène dans les rues, une chance. La dame monte prestement derrière moi et en route pour l’aventure, elle aussi a abusé du parfum, le mélange est irrespirable, heureusement le chemin est vite avalé, la ruelle vite franchie et nous nous retrouvons sur la route où la vitesse chasse les effluves contrastés.
Elle se tient parfaitement bien sur ma moto, elle suit mes mouvements de balancier, de temps en temps je sens ses genoux le long de mes cuisses, j’ai l’impression qu’une sorte de fluide traverse ma combinaison.
- Terminus, tout le monde descend, il faut faire le reste à pied.
Nous venons d’arriver aux abords de la clairière.
- Tu pilotes très bien, comme Louis, feu mon mari, avant la guerre nous avions une grosse Terrot, nous allions nous promener chaque dimanche, j’adore faire de la moto, c’est excitant.
Nenette secoue ses cheveux aux reflets roux, son beau visage à la peau transparente et piquetée de minuscules tâches de rousseur ressemble à une pomme reinette, j’aurais envie de croquer ce fruit appétissant.
Maria a entendu les pétarades amplifiées par l’écho, elle nous attend en haut de son escalier.
- C’est moi Nénette, tu me reconnais?
- Nénette, mon Dieu, toi bien gentille, toi venir pour traire chèvres, et Albert comment il est, Albert?
Je lui donne le dernier bulletin de santé, la Polonaise sourit béatement.
Pendant que je retire ma combinaison, la rousse enlève sa grosse veste de laine, je reste cloué, tétanisé, dessous, elle ne porte qu’une blouse à bretelles, une blouse bien échancrée ; de profil, son sein gauche apparaît presque entièrement, en pleine forme, conquérant. Je n’ai jamais été troublé à ce point, même chez Marguerite. Je tire sur les tétons de la biquette avec une telle ardeur que la bête manifeste des signes de mauvaise humeur, elle donne quelques coups de patte dans la casserole, culbutant le peu de lait que je viens d’extraire. Nénette change de place et cette fois je peux voir l’intérieur de ses cuisses, un régal, j’ai le regard fixé plein centre, attendant un mouvement qui me permettrait de voir la petite culotte. Et si elle n’en avait pas? A l’école communale, ma dernière année de présence avait vu l’avènement de la mixité, Simone, une grande fille de quatorze ans nous dévoilait souvent son anatomie intime, elle n’avait que rarement une petite culotte. J’ignorais si elle s’exhibait volontairement mais cette vision avait parachevé mon éducation sexuelle, j’avais compris la complémentarité qu’apportait une femme à un homme normalement constitué; plus tard, lors de plaisirs solitaires, c’est à l’impudique Simone que je pensais, à son triangle velu, à cette porte vers le bonheur.
- Heureusement que tu n’as pas un troupeau de biquettes à traire, il te faudrait une journée entière, laisse-moi faire, tes mains ne sont pas assez délicates, il faut du doigté, de la dextérité et surtout de la douceur, regarde comment il faut faire, délicatement, et le lait sort tout seul.
Elle me provoque la garce, elle me fait une démonstration et ses mouvements de main ont une connotation érotique, en prime, elle appuie sa poitrine sur mon épaule; j’ai une envie folle de lui sauter dessus, de la culbuter dans l’herbe. Je suis fou, nous ne sommes pas des animaux, quand le paysan présente une vache à un taureau, l’encorné ne se pose aucune question, il connaît le mode d’emploi et va droit au but, et l’étalon avec la jument, c’est encore plus spectaculaire. C’est ainsi, vers l’âge de dix ans que j’avais commencé à comprendre le mécanisme de la transmission de la vie, la naissance d’un veau ou d’un poulain quelques mois plus tard avait confirmé mes suppositions, et puis des questions à grand-père, ses réponses claires m’avaient édifié.
J’accepte le cidre de Maria, j’ai la gorge tellement sèche, je ferme les yeux, oubliant les ébréchures du verre, le liquide est bon, doux, sucré, un véritable nectar.
- A demain, sauf si Albert lui revenir, moi bien contente si lui revenir, moi peur toute seule ici dans la forêt.
- Tu pourrais revenir au village provisoirement, je peux t’héberger, j’ai assez de place chez moi, je peux envoyer Lucien le boucher pour te prendre.
- Non, jamais revenir à Labréville, moi trop mauvais souvenirs, les gens tellement méchants.
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