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Le dessous des cartes

Un nouveau courriel, ayant probablement la même source que le premier mais venant d’un pseudo différent m’arrive. « L’assassinat de Jacky Vernet découle d’une histoire d’argent ». Nous n’avons pas les moyens de connaître l’IP du correspondant, la recherche de l’auteur est impossible.

Je note tout de même que les deux pseudos ont un point commun, le premier était «jupiquart» le second « venusdomino », un ou une passionnée de mythologie romaine, avec le premier, je pensais à un homme mais l’autre vient contredire cette supposition.

Je décide de faire un tour au siège de la SIC, je maintiens ma première idée, le messager doit faire partie du personnel de cette société, je vais essayer de trouver des indices qui me mettent sur la voie.

-Monsieur Passy, vous avez du nouveau ?

L’hôtesse d’accueil-standardiste est très souriante, elle doit avoir quelques années de maison, je l’ai toujours vue à ce poste, je me souviens que Vernet estimait qu’il était capital d’être bien accueilli, il avait raison.

-Vous vouliez voir Sylvain ? Ils sont tous sur le site des Vergers de Montcy, Annie, Sophie, l’architecte, le banquier et le futur maître d’œuvre

-Si je comprends bien, le programme est maintenu.

-Absolument, ce sont les femmes qui prennent le pouvoir, Guy aurait apprécié, Annie et Sophie, un beau duo.

-Annie a des connaissances, mais Sophie est jeune.

-La valeur n’attend pas le nombre des années…Je connais mes classiques…Elle est douée la demoiselle, parfois je la compare à Guy quand nous avons commencé, il y a…Je ne vous le dit pas…C’était hier !

-Vous connaissiez monsieur Vernet depuis longtemps ?

-Sa sœur était ma meilleure amie, depuis l’enfance…Elle a un accident de voiture, mortel, il y a vingt ans…Nous en parlions encore…

Le sourire s’estompe, je respecte son silence.

-Je pense qu’ils ne devraient pas tarder à revenir, vous voulez attendre, ou laisser un message à Sylvain ?

-Non je reviendrai.

Je n’avais pas remarqué sur le mur du hall, un tableau représentant Vénus sortant du bain.

-C’est nouveau ce décor ?

-Le tableau, oui, vous avez l’œil, Guy l’avait acheté dans une salle de vente, c’est une reproduction naturellement mais il l’avait trouvé assez réussi.

-Et vous ?

-Oui, c’est agréable…Mais surtout pour les hommes.

-Pour les dames, il faudrait un tableau représentant Apollon ou Jupiter.

Je guette une réaction de mon interlocutrice, elle ne sourcille pas, elle n’est pas ma correspondante anonyme ou alors elle a un bel aplomb, seulement mes suppositions deviennent des certitudes, les deux messages sont signés, l’auteur fait partie du personnel.

-Moi vous savez, les tableaux, et j’ai la vue qui baisse !

-Combien d’employés dans vos bureaux ?

-C’est variable, actuellement ? Sylvain et Sophie, Brigitte et Armand à la compta, Adèle au service recouvrement, elle aussi fait partie des meubles, nous étions les premières, et puis  trois techniciens et quatre commerciaux, rarement ici, souvent sur le terrain mais chacun a son bureau… et puis moi, Mado, le pilier de l’accueil.

-Que des hommes sur le terrain ?

-Non, une géomètre et deux… agentes commerciales, il faut dire comme ça maintenant…Excusez-moi.

Le téléphone sonne.

-Depuis le drame, quelques clients s’inquiètent, ils veulent savoir si leurs commandes seront honorées, je les rassure, ce n’est pas évident.

-Vous connaissez Guy depuis l’enfance aussi ?

-Oui, ses parents étaient séparés, son père s’était remarié et il n’avait plus de contact avec ses enfants, Guy a appris qu’il était mort longtemps après.

-La dame dans le petit bureau à droite, c’est Adèle ?

-Voyez elle n’est plus toute jeune non plus.

Je la distingue mal, derrière la cloison vitrée, et si c’était elle venusdomino alias jupiquart ?

-Que pense-t-elle du tableau ?

Mado est surprise de ma question.

-Devinez ? Quand elle entre et quand elle sort elle s’arrête pour l’admirer, elle rêvait d’être comme elle, certainement, moi aussi…Remarquez, maintenant la vraie doit être dans un drôle d’état...

Mon intuition est bonne, j’aimerais bavarder en tête à tête avec madame Adèle.

 

-Aucun message pour Sylvain ?

-Dites-lui que je suis passé, que je reviendrai prochainement.

-Prenez rendez-vous, vous serez certain de le trouver.

-D’accord, je téléphonerai.

 



24/07/2012
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