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Le dessous des cartes

Je me préparais à quitter le bureau après une journée chargée mais, alors que j’allais fermer mon PC, il m’indiquait de sa voix féminine et agréable que j’avais des e.mail. J’ouvrais le message, il était laconique. « Jacky Vernet ne s’est pas suicidé, il a été assassiné ». Mon réflexe était de répondre immédiatement à ce courriel en demandant des précisions, je m’attendais à un retour immédiat du fameux message d’erreur et j’avais raison, mon informateur avait déjà supprimé son adresse provisoire.

 

Jacky Vernet, promoteur immobilier, PDG de la Société Immobilière du Coteau (SIC) s’était tiré une balle dans la tête il y a tout juste une semaine. Il avait été découvert dans son bureau par une femme de ménage prenant son service de nettoyage à quatre heures du matin. L’arme appartenait à la victime, il avait un permis. Stupéfaction pour les employés quand ils sont arrivés à huit heures, la veille, le patron avait quitté son bureau plus tôt que d’habitude et il avait prévenu sa secrétaire qu’il serait en retard le lendemain. Etant donné la personnalité de Jacky Vernet, notre quotidien avait relaté ce drame, rappelant le parcours du suicidé. Issu d’une famille modeste, il avait réussi à se hisser parmi les hommes les plus en vue de la ville et du département. Ses réalisations immobilières étaient nombreuses et il faisait des affaires juteuses, achetant parfois des terrains inconstructibles qui le devenaient, ce qui suscitait quelques interrogations, certains n’hésitaient pas à parler  de collusion avec certains élus du secteur et en particulier avec le député-maire de la ville.

En dehors de ses affaires, Jacky Vernet avait une vie assez mouvementée, il aimait les grosses voitures et les jolies femmes, à 45 ans, il avait été marié deux fois et deux fois divorcé, il avait un enfant de sa seconde épouse, un fils de sept ans. Il était connu pour ses frasques et ses fêtes, c’était aussi un joueur de poker invétéré.

Le suicide avait surpris, il aimait tant la vie et ce n’était pas l’enquête en cours concernant un important complexe immobilier en projet qui pouvait le perturber, il avait déjà subi ce genre d’aléas et, à chaque fois il en sortait blanchi. Une déception sentimentale ? Cela semblait improbable. La raison la plus fréquemment évoquée pour justifier cette mort brutale tournait autour d’un problème de santé, certains affirmaient qu’il était inquiet suite à des examens médicaux. « Il n’aurait jamais supporté se retrouver diminué, il a préféré partir avant une déchéance physique », indiquaient quelques amis.

Les employés de son entreprise avaient une autre version concernant cette mort brutale, évoquant un assassinat, comme l’affirme le message que je viens de recevoir. Il est évident que les motifs pour trucider Vernet étaient nombreux, une maîtresse évincée, un mari jaloux, un entrepreneur floué, un élu qui, se sentant menacé aurait supprimé un témoin gênant ?

Je passe un coup de fil au commissariat et j’ai la chance de tomber sur Eric, mon inspecteur préféré car le plus coopératif.

-A chaque suicide ou presque, nous recevons des lettres anonymes dans ce sens, le commissaire les prend au sérieux, concernant Vernet, il y a tout de même des faits troublants qui pourraient écarter la thèse du suicide, je ne peux t’en parler au téléphone, prends rendez-vous avec mon chef, naturellement, je ne t’ai rien dit.

Avant de rencontrer le commissaire Simon, je vais essayer d’en savoir un peu plus sur la victime en rencontrant ses employés, je vais retracer son parcours professionnel, ce genre de récapitulatif intéresse nos lecteurs, d’ailleurs depuis la parution du premier article le concernant, la Gazette Républicaine connait un regain de vente, et puis sa disparition va peut-être délier quelques langues.

Je suis bien reçu dans les vastes locaux de la SIC, installés sur les hauteurs de la ville. Il avait bien choisi l’endroit, de ses bureaux situé au premier étage, le rez-de-chaussée étant réservé au parking, il avait une vue imprenable sur l’agglomération, à commencer par sa première réalisation, les Domaines du Coteau, un ensemble immobilier composé de maisons individuelles et de petits collectifs, un quartier agréable, apprécié par ses résidents.  



02/07/2012
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