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Le bois des Grives

Il faut aimer le calme et la forêt pour vivre dans la maison forestière de la Fontaine-aux-Charmes, à plus de quatre kilomètres d’un lieu habité.

-Vous ne risquez pas d’être dérangés.

-Détrompez-vous monsieur Passy, nous sommes sur un chemin de randonnée qui vient d’être balisé, de nombreux marcheurs l’empruntent.

-Cela vous fait un peu d’animation.

-On peut dire ça, également un peu de travail, après chaque week-end, je fais du nettoyage, les marcheurs de la semaine sont corrects, mais ceux du dimanche n’ont aucun respect de la nature, ils laissent des traces de leur passage et, quand ils mangent en forêt, faut voir, pire que des sauvages, certains se permettent même de faire du feu, c’est strictement interdit, j’ai déjà appelé les gendarmes.

Madame Moreaux approuve.

-Et pas seulement des jeunes, des adultes aussi, un bel exemple !

-Malgré votre retraite, vous êtes restés dans cette maison.

-Les nouveaux préposés ne veulent plus vivre en reclus, surtout quand ils sont mariés, l’ONF nous a proposé de rester, nous sommes heureux ici.

-Et les hivers, ce n’est pas trop difficile?

-Nous faisons des réserves, et puis la neige, ce n’est plus ce que c’était, l’hiver dernier, nous en avons eu trois jours seulement, elle a fondu rapidement.

-Le gibier doit être abondant dans ce secteur?

-Ne m’en parlez pas, les chasseurs de maintenant font de l’élevage en plein air, ils apportent de la nourriture en hiver, résultat, un cheptel de plus en plus important, je ne mets plus de pommes de terre dans mon potager, les sangliers viennent les récolter avant moi, j’avais mis un grillage, ces vandales l’ont défoncé, les agriculteurs sont furieux, des hordes de sauvages détruisent les champs de maïs… Norbert de Verlimont m’a expliqué le but de votre visite, je n’oublierai jamais ce fameux dimanche, d’ailleurs c’était mal engagé dès le départ, il me manquait un homme, justement ce Maurice Couturier qui semble vous intéresser,  j’avais déjà réparti les présents sur toute la largeur quand il est arrivé, j’étais fâché, je voulais le renvoyer mais il a insisté pour participer à la battue, comme c’était un protégé de Gauthier j’ai accepté qu’il reste, je lui ai dit de se placer où il voulait.

-Il a choisi quel tracé ?

-Partisan du moindre effort, il s’est placé dans l’axe d’un layon, d’un petit chemin.

-Son retard était peut-être motivé par cette envie d’éviter les taillis et les ronciers.

-C’est bien possible, c’est ce que j’ai pensé aussi.

-Quel chasseur était posté en face de lui ?

-Difficile à dire, le docteur Marnat avait des difficultés pour marcher, ce pouvait être lui, à côté de Gauthier.

-Et Norbert ?

-Norbert ? Ah oui, c’est vrai, le docteur n’était pas venu, c’est Norbert qui l’avait remplacé.

Je lis de la curiosité dans le regard de madame Moreaux, curiosité qu’elle ne peut retenir.

-Vous pensez, comme mon mari, que Jean Calluis n’est peut-être pas le coupable ?

-Jacqueline ! C’est vrai, j’ai toujours eu quelques doutes, quand le coup de feu mortel a été tiré, j’étais en retrait, je gardais une certaine distance avec mes hommes, environ un quart d’heure avant, j’avais entendu une moto arriver sur le chemin des Grives, en admettant que c’était Jean Calluis, il lui aurait fallu galoper à travers les fourrés pour arriver face à Gauthier, et puis il risquait de prendre une volée de chevrotines, où alors, la moto, c’était peut-être un autre.

-Vous avez été interrogé par la gendarmerie ?

-Oui, aussitôt, mais vous savez dans de tels cas, sous le choc, on ne sait plus quoi dire, quand je suis arrivé à proximité du drame, j’ai croisé un rabatteur, il m’a crié, « Verlimont est mort, Verlimont est mort ! » Je croyais qu’il s’agissait de Norbert, je pensais même que ce pauvre garçon s’était suicidé.

-J’aimerais faire un tour dans le secteur où se situait la chasse, éventuellement prendre le chemin qu’avait emprunté Couturier, voir les emplacements des frères de Verlimont, c’est possible ?

Cette demande semble plaire à Albert Moreaux.

-Quand vous voulez, demain si vous avez le temps, les prévisions de la météo sont bonnes, ça me rappellera bien des souvenirs, pas seulement de la chasse mais aussi de mes tournée d’inspection en forêt, j’en ai parcouru des kilomètres et des kilomètres… Je préviens Norbert, le propriétaire, et mon successeur à l’ONF, c’est la démarche obligatoire.



08/02/2012
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