Le bois des Grives
Le destin est curieux, alors qu’une session de la cour d’assises va débuter, je rencontre l’avocat d’un accusé qui n’est autre que celui qui défendait Jean Calluis. Maître Bourguignon a évolué, il est devenu l’un des ténors du barreau.
-Si je me souviens ! J’étais novice, c’était ma troisième plaidoirie et la première aux assises, j’étais impressionné par le procureur général, un colosse à la voix tonitruante, et puis mon client avait tout contre lui.
-Il n’a jamais avoué ce crime.
-Cher monsieur, presque tous mes clients clament leur innocence.
-Vous n’en étiez pas persuadé ?
-Franchement non, c’était une situation délicate croyez-moi, j’aurais préféré qu’il plaide coupable, qu’il explique son geste…J’ai tout de même réussi à convaincre le jury qu’il avait des circonstances atténuantes, le procureur réclamait la réclusion à perpétuité.
D’après les articles de Raymond, l’avocat n’y était pour rien dans cette modération.
-Mais pourquoi me parler de cette affaire, j’attendais vos questions sur celle en cours.
-Cela viendra Maître…
Je donne les raison de ma curiosité et ma version des faits.
-C’est intéressant, voyez monsieur Passy, il y a une vingtaine d’années, les services de police ne disposaient pas des moyens d’investigation actuels, dans les affaires rurales en particulier, un faisceau de preuves débouchait souvent sur une inculpation et une condamnation.
-A partir des éléments que j’ai recueillis, pensez-vous que le dossier puisse être exhumé ?
-C’est possible, la clé est détenue par celui que vous suspectez, le sieur Cordonnier.
-Couturier !
-C’est cela, s’il avoue le crime, si les données que vous venez de m’indiquer s’avèrent exactes, monsieur Calluis sera réhabilité.
J’ai bien l’impression que l’avocat adhère à ma version et je ne suis pas surpris de sa conclusion.
-Tenez-moi au courant de vos démarches en direction de ce Couturier, si mon ancien client a besoin d’un avocat, d’un bon avocat, je suis partant, au même tarif que lors de son procès, un cadeau…
Je doute fort que Jean Calluis mandate Me Bourguignon s’il a besoin d’un avocat, quoique !
Comme promis, Jean-Louis me donne des nouvelles de Couturier.
-Ton bonhomme est actuellement à l’ombre, condamné à quatre mois de prison pour violences dans un lieu public, c’est un récidiviste.
-Tu as recueilli d’autres renseignements sur lui ?
-Il est arrivé dans la région fin 1976, il avait acheté un pavillon dans la banlieue de Grenoble, c’est là qu’il réside quand il n’est pas en taule, il vit de petits boulots.
-D’après les gens d’ici, il n’avait jamais un sou, il dépensait au fur et à mesure qu’il gagnait et tu dis qu’il a acheté un pavillon ?
-Ce n’est certainement pas un palace, je connais le quartier, comment comptes-tu le démasquer, en admettant que tu sois sur la bonne piste ?
- Il a certainement acheté la maison avec l’argent du contrat mais c’est improuvable, par contre, il devrait posséder une carabine, volée en 1976 à Jean Calluis en même temps que l’arme utilisée pour le crime.
-Il l’a peut-être vendue, cette carabine ?
-Clandestinement alors, c’est une arme de guerre, il est interdit de la posséder en l’état, elle doit être démilitarisée.
- J’ai de bons amis dans la police, dont le commissaire chargé du secteur où réside ce gaillard, c’est lui qui m’a tuyauté, je vais lui en parler, il a peut-être la possibilité de diligenter une perquisition ?
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