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La nymphe vengeresse

-Il a l’air bien sympathique ce bled de Mauzieux, j’aimerais y faire un tour, il doit y avoir de belles photos à prendre.

Je promets à Benoit de l’emmener lors de ma prochaine visite du bourg.

 

Je ne pensais jamais que ma promesse allait se concrétiser aussi rapidement, avant d’être averti par le correspondant, je recevais un appel de l’adjudant Bertrand.

- Nouveau drame dans votre village favori, Joseph Radzic, alias Tito retrouvé mort dans sa bicoque, asphyxié, inutile de penser à mal comme c’est votre habitude, il s’agit  d’un accident malheureusement classique, un fourneau à bois au ralenti, monoxyde de carbone, le tueur invisible, si cela vous intéresse, vous pouvez venir sur place, nous y serons à quinze heures avec un expert.

Benoît est libre, nous partons.

Je m’attendais à découvrir une cabane, la maisonnette de Radzic est coquette, un seul niveau, crépi clair récent, fenêtres à croisillons, une véranda couvre une grande terrasse carrelée.

 Le break de la gendarmerie est stationné devant le portillon.

Nous traversons un jardinet, l’entrée est sur le côté.

- Ponctuel messieurs, c’est rare à notre époque, le corps a été transporté à la salle mortuaire de la commune, la victime est morte dans la nuit de vendredi à samedi, le curé du village se charge de trouver un pope pour les obsèques, Radzic était orthodoxe.

L’intérieur de la maison sent encore la peinture fraîche, le sol de la grande pièce est recouvert d’une moquette de belle qualité, la cuisine est bien aménagée, les meubles et les appareils ménagers sont neufs, la salle de bains est modeste mais les éléments sanitaires et la robinetterie sont de bonne facture.

- Le luxe, je sais  qu’un bûcheron courageux gagne bien sa croûte mais il a dû casser sa tirelire pour se payer tout ça, et l’ensemble ces travaux datent de cette année ; d’après les voisins, avant les travaux de rénovations c’était réellement une baraque.

- Accident, vous en êtes certain ?

- Nous venons d’avoir confirmation, l’expert vient de partir, pressé ce monsieur, sa conclusion orale est formelle, le gaz émanait du poêle à bois, Radzic a été victime de la rénovation de ses menuiseries, fenêtres et portes trop étanches, aération inexistante alors qu’avant les travaux, ses vieilles fenêtres disjointes permettaient un renouvellement d’air, une ventilation qui le protégeait des risques...vous pensez la même chose que nous, le Serbe ne jouait ni au loto, ni aux courses, il n’aurait pas fait un héritage, seules possibilités, un don spontané ou...

- La découverte d’un magot.

- Nous avons retrouvé quelques factures, nous allons mettre nos spécialistes financiers sur le coup, contacter les fournisseurs de tous ces matériaux, savoir de quelle façon ils ont été réglés. 

Je regarde le fourneau installé dans le couloir,  tapote le tuyau

- Nous avons vérifié le conduit de cheminée, il n’a pas été bouché, c’est bien un accident malencontreux. Votre source est tarie, si le vieux bûcheron a bien été assassiné comme vous le supposez, le fantôme de Radzic plane sur ce crime, dans la foulée, il a pu commettre les deux autres.

Pendant que le photographe mitraille tout azimut, je bavarde avec un gendarme qui était déjà en poste lors de l’affaire Limonet.

- Je débutais dans le métier, au début, j’avais été surpris par l’ambiance de ce bourg, depuis je me suis habitué, vous savez que monsieur et madame Limonet sont toujours en vie.

- Il me semble qu’ils habitent dans les environs ?

- Juste au-dessus, leur maison est visible de la cour, venez.

Je reconnais les volets verts de la maisonnette.

J’ai envie d’aller saluer ces braves gens avant de quitter Mauzieux.

- Si tu veux faire un tour dans les rues, je monte chez de vieux amis, tu me récupères dans trois quarts d’heure,  rue Haute, au numéro 12.

Benoît va griller quelques pellicules comme à son habitude.

- Monsieur...j’ai oublié votre nom, je perds la mémoire, c’est gentil de nous rendre visite, voyez encore nous sommes encore là, un peu fatigués tout de même, nous craignons surtout les hivers, nous ne sortons pratiquement plus, une assistante familiale s’occupe de nous, elle nous apporte ce dont nous avons besoin, fait le gros ménage.                                                              

 Je salue madame Limonet,  elle est un peu plus ridée qu’avant mais elle est toujours alerte.

- Les bandits ont été relâchés, c’est notre fille qui nous a prévenus, nous prenons des précautions, on ne sait jamais, si ces voyous voulaient se venger.                                                

- Sois sans crainte,  ils n’oseront plus se frotter au père Limonet,  j’ai mon fusil de chasse chargé et à portée de mains...alors, Tito a passé l’arme à gauche, un jeune en pleine forme, il va être pleuré à Mauzieux, du moins par les femmes, les hommes vont pousser un soupir de soulagement, depuis qu’il avait refait sa bicoque, il recevait.

- Une femme ?

- Au moins deux, peut-être plus, je ne surveillais pas en permanence, vous dire qui c’était, impossible d’ici, je n’ai plus mes yeux de vingt ans.

- Fernand Maillard, vous l’avez connu.

- J’ai travaillé avec lui, nous n’étions pas copains, c’était un rouge, un communard, moi je suis gaulliste vous comprenez, on s’engueulait souvent à cause de la politique...autrement question boulot, rien à redire, c’était un bon bûcheron.

- Il paraît qu’il était économe.

- Econome ? radin vous voulez dire, sa bobonne a tenu huit ans et elle a fait la valise, la vie qu’il lui menait, à tout rationner, jusqu’aux allumettes c’est vous dire...son argent ? peut-être bien qu’il a servi par retaper une maison.

- Vous accusez Radzic ?

- Attention, j’ai pas dit que Tito l’avait zigouillé, je dirais qu’il a seulement trouvé la cachette... je suis bête, j’aurais pu passez avant, je me doutais où Fernand planquait ses billets.

- Où ?

- Dans une grotte près de la Fontaine-aux-Chênes, j’en mettrais ma main au feu.

- Et si nous allions sur place, j’aimerais prendre des clichés de cette fameuse source miraculeuse.

Benoît avait vite fait le tour du bourg, il venait de me rejoindre.

 Il a une bonne idée, seulement, je serais incapable de retrouver l’emplacement.

- Si vous voulez, je vous accompagne, je vous montrerai le chemin, il fait beau et sec, un peu d’air me fera du bien, et puis il y longtemps que je ne suis pas allé dans ce secteur, je ne suis plus motorisé, j’ai donné ma moto à un ferrailleur, et à pied c’est un peu loin.

- Il nous faut des bottes, les abords de la source sont marécageux.

- J’ai tout ce qu’il vous faut, les enfants m’ont laissé un équipement complet dans le sous-sol.

- Vous nous montrerez la grotte.

- Visite complète des lieux, c’est intéressant, on peut passer par la route des moines, c’est plus court et comme ça vous verrez les ruines du monastère.

 



30/10/2011
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