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L'araignée rouge

Un sujet qui me fait sortir de la routine, entre les accidents de la route de plus en plus nombreux et les audiences dans les tribunaux de plus en plus barbantes, il me reste peu de temps à consacrer à des investigations.

J’avais écrit plusieurs articles relatant cette pénible affaire, en les relisant, je remonte au mois de septembre 1991, c’est le dimanche 15 que le corps d’une adolescente de dix-sept ans est retrouvé dans le canal, à l’entrée d’une écluse, les premières constatations révèlent une mort par strangulation, un soupçon de viol est confirmé le lendemain, l’heure du décès se situe entre 21 heures et 22 heures. Karine Chaloux, la victime était la fille d’un commerçant aisé de St Jean. L’enquête se dirigeait vers les habitations bordant le canal entre deux écluses, d’après ses parents, la jeune fille devait dormir chez sa grand-mère habitant le quartier, cela lui arrivait fréquemment le samedi, ils ne s’étaient donc pas inquiétés.

Poussant son scooter, Karine avait traversé le canal en empruntant la passerelle de l’écluse, c’est interdit mais l’éclusier fermait yeux, bien souvent il accompagnait les jeunes qui, par ce chemin évitaient un  grand détour par le pont. L’éclusier avait déclaré que la jeune fille était passée vers 18 heures, elle lui avait dit qu’elle couchait chez sa grand-mère.

-Quand elle remontait le soir à la nuit tombée, elle sonnait à ma porte en passant et je l’accompagnais jusque sur l’autre rive.   

Le scooter a été retrouvé derrière un talus, plusieurs témoins affirment avoir vu, en soirée, la demoiselle en compagnie d’un homme de grande taille à hauteur d’un chalet bordant le canal. Depuis une fenêtre, une voisine déclare avoir aperçu le couple se diriger vers un garage situé en retrait, elle a ajouté que l’homme est ressorti seul longtemps après. Le suspect, c’est Jacques Vallon, ancien officier de la marine marchande, il réside à Dunkerque et vient d’acheter un chalet à St Jean. Propriétaire d’un bateau de plaisance, circulant sur les canaux français, cette résidence secondaire lui permettait de faire escale entre le Nord et la vallée du Rhône dans un petit port fluvial situé entre les villes de St Jean et de Viramont.

Le corps de la victime a été découvert à l’aube mais, entre temps, le couple Vallon avait levé l’ancre et leur bateau se dirigeait vers l’écluse.

Alors que le bateau venait de stopper devant les portes en attendant leur ouverture, un coup de feu éclatait, Jacques Vallon, à la barre, était atteint à l’arrière de la tête, il expirait quelques minutes plus tard dans les bras de son épouse. Le rapport indiquait que la balle provenait d’une carabine 22 long rifle.

L’éclusier et plusieurs pêcheurs, témoins de ce drame, n’étaient pas d’accord, certains affirmaient que le coup de feu venait de la droite, d’autres de la gauche, les gendarmes avaient échoué dans leurs recherches du tireur.

Toute la ville ou presque se réjouissait de cette conclusion, la culpabilité du marin ne faisait aucun doute, d’autant plus qu’un peu plus tard dans la matinée, une boucle d’oreille de Karine était retrouvée à l’entrée du garage de Jacques Vallon.   

Madame Vallon était effondrée, elle ne comprenait pas que son mari puisse être accusé d’une telle infamie, elle déclarait qu’effectivement une jeune fille était venue demander de l’essence pour son scooter, que son mari pensait en avoir dans le garage mais le bidon était vide.

-Elle est repartie en suivant le bord du canal certainement pour reprendre la ruelle qui débouche dans la rue; avant de rentrer à la maison, mon mari a chargé du matériel dans le coffre de la voiture, il avait déjà fait deux voyages dans la journée jusqu’au port.

Quant à l’appareillage, il était prévu depuis plusieurs jours d’après l’épouse, seulement le samedi, les employés du port ne travaillaient pas, aucun témoin n’avait vu le marin décharger du matériel et le transborder dans son bateau.

Le témoignage de l’épouse n’était pas pris en compte, évidemment.

Dans l’un de mes articles concernant cette affaire, j’avais émis des réserves sur la culpabilité de Jacques Vallon, non en raison de la personnalité du suspect mais dans la façon de se débarrasser du corps, il était évident qu’il serait rapidement visible, flottant dans le canal, et puis une fuite en bateau, à vitesse réduite, sans compter les nombreuses écluses me paraissait singulier.

Je me souviens  encore des difficultés rencontrées pour faire mon métier de journaliste, le mutisme et même l’hostilité des personnes rencontrées. J’imagine que trois ans après, il suffit de remuer un peu ces souvenirs pour voir resurgir cette hostilité, monsieur Magnien a raison, la ville est sous la coupe de bourgeois qui font la pluie et le beau temps, les administrés n’ont d’autre solution que de se soumettre s’ils veulent avoir du travail ou un logement.

 



18/12/2011
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