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La veille de la Libération

La veille de la Libération

 

L'avancée des troupes alliées était suivie de près dans le village, c'était le principal sujet de discussion chez les commerçants et dans les cafés.

-Dans un ou deux jours ils sont ici, enfin…

Les quelques soldats Allemands cantonnés dans le village, surveillants des ouvriers agricoles dans une grande exploitation gérée par l'occupant pliaient bagages.

-Bon débarras !  

Un peu d'appréhension tout de même, pourvu que tout se passe bien.

A midi, grand-père m'apostrophait aussitôt le repas.

-Tu montes avec moi au verger, ramasser les prunes et les mirabelles.

Une corvée, mais je ne pouvais lui refuser, il fallait qu'il remplisse ses tonneaux pour préparer sa fameuse goutte, c'était un rituel.

Un voisin, travaillant à la SNCF, était venu nous avertir que les boches avaient miné le pont du chemin de fer et la ligne en plusieurs endroits.

-Ils vont allumer les mèches avant de déguerpir, faudra se méfier, pour le pont, ils ont mis une sacrée charge !

Avant de monter au verger, grand-père avait recommandé à ma mère d'ouvrir toutes les fenêtres de la maison.

-Les explosions pourraient casser les carreaux.

Nous allions terminer le ramassage sous un prunier quand une première explosion retentissait.

-C'est sur la ligne, avant la gare !

La voie ferrée passe juste en contrebas.

Une seconde suivait et, dans le pré voisin, les vaches étaient affolées.

La troisième semblait encore plus proche et, dans un sifflement lugubre, un morceau de rail tombait à quelques mètres de nous.

-Ne le touche pas, il doit être bouillant, allons plus loin.

C'est à l'abri d'une butte que nous retrouvions plusieurs habitants du village.

-Quand le pont va sauter, le quartier de la rue Basse va y passer…

Je craignais pour ma mère, espérant qu'elle avait quitté la maison pour se mettre à l'abri dans une cave.

Un éclair dans la vallée, une projection de matériaux à une hauteur phénoménale et quelques dixièmes de seconde après, une terrible explosion.

-Cette fois le pont est foutu !

C'est vrai que ce pont avait résisté à un sabotage lors du repli des troupes Françaises, également à un bombardement des avions Anglais, c'était du solide.

Un grand calme régnait après cette dernière explosion, je descendais à toute allure vers la maison, craignant le pire.

Ma mère avait ouvert les fenêtres, aucun carreau cassé, contrairement aux voisins qui n'avaient pas pris cette précaution, à part cela, aucun dégât sur les maisons, les blocs de béton et de rail étaient retombés sur place. Quant à l'ouvrage, il avait une fois de plus tenu le coup, n'ayant qu'une plaie minime qui fut vite réparée par les hommes du génie américain.

 

La nuit suivante, des colonnes de chars et de camions américains passaient sur la route nationale, malgré une distance de trois kilomètres à vol d'oiseau, le bruit s'entendait.

 

(Extrait de souvenirs d'un enfant durant la seconde guerre mondiale)



04/02/2010
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